De la difficulté de trouver un QG à Paris
Bien que je n'y passe plus trop de temps grâce aux joies du télétravail et de mon enrichissement capitaliste, j'ai régulièrement besoin d'aller à Paris pour divers raisons, et j'aime bien avoir un lieu ou me poser, un QG. Et comme mon travail est de prévoir l'imprévu, j'aime bien avoir des plans de secours. Et c'est la difficulté à trouver ce plan de secours qui va être le sujet aujourd'hui.
Quand je parle de QG (pour quartier général), je parle d'un lieu qui doit remplir un certain nombre de fonctions, à savoir permettre d'amener quelqu'un pour un rendez vous, et me permettre de me poser. J'ai déjà un lieu comme ça, et je vais garder le nom pour moi pour ne pas compromettre ma couverture.
La seconde fonction est la plus rapide à vérifier. Il faut que le lieu soit ouvert dans l'après midi ou le matin. Il faut aussi avoir des tables, des chaises confortables, assez de prises de courant, et si possible, du wifi. J'arrive à me passer de ça via la réseau 4G, mais il y a des endroits dans Paris ou on ne capte pas, surtout dans les bâtiments.
Idéalement, le lieu doit aussi être calme, au moins dans l'après midi. Si je travaille un peu, j'aime bien ne pas être distrait par une musique trop forte, ou un match de foot à coté. Idéalement, ne pas donner sur une rue passante ou une route est aussi important pour avoir un peu de silence.
Et déjà, c'est assez dur de trouver des lieux comme ça. Il y a des bibliothèques dans Paris mais le wifi est assez souvent restreint, les sièges sont pas toujours confortables et même si c'est en général silencieux, c'est parfois trop silencieux.
Et surtout, ça ne permet pas de remplir la première fonction, celle de pouvoir amener un date.
Pour cette fonction, les critères sont légèrement différents. Pour commencer, il faut être ouvert le soir, vu que j'ai souvent des dates après une journée de travail. Idéalement, servir à manger ou à boire est un plus, et si possible, avoir des options vegans. La localisation du lieu est aussi importante car ça permet de basculer vers un restaurant (si possible pas trop cher, avec des options vegans et de la nourriture correct). Et surtout, il faut que le lieu soit LGBT friendly, ce qui est assez dur à vérifier. Le lieu doit aussi être calme pour pouvoir discuter car quand on peut pas compter sur sa musculature comme moi, c'est assez important d'utiliser ses autres atouts pour un rencard.
Du coup, la sélection se réduit assez vite aux bars et cafés queers de la capitale et c'est la qu'arrive le plus gros souci.
Des bars gays dans Paris, il y en a un paquet et je peux citer par exemple Le Bear's den, le Raidd, El Hombre. Certains sont plus des boites de nuit et ouvrent tard le soir car ce sont des lieux festifs connus pour leur ambiance, et c'est pas exactement ce que je vise. Il y a également les lieux qui ciblent un public spécifiquement féminin comme la Mutinerie, le 3W Kafé ou le Bonjour Madame. Comme je suis un mec cis, je me dit que je ne vais pas être le bienvenu. Et la Mutinerie ne rentre pas dans la catégorie "café calme".
J'ai donc commencé à chercher plutôt du coté des cafés, et j'ai trouvé sur le web plusieurs initiatives comme la Constellation ou le Friendlies. Mais la Constellation a fermé après 4 mois d'opération, et le Friendlies après 1 mois. Je n'ai pas eu le temps de mettre les pieds la bas que ça a déjà disparu.
Au moment ou j'écris ces lignes, il y a également les discussions autour de la réouverture de Violet et Co avec comme plan d'y rajouter un café (équitable, etc, etc). C'est relativement tentant mais vu que la communication est à base de "seule librairie féministe lesbienne et LGBTI+ de Paris", j'ai le sentiment que ça ne va pas être pour moi. Et de plus, la formulation est trompeuse car les Mots à la Bouche existe depuis 1980 sur le créneau "librairie LGBTI+ à Paris", et la librairie des Femmes existe depuis 1974 sur le créneau "féminisme". Ensuite, vu les écrits un peu essentialiste de la fondatrice, c'est peut être moins compatible avec les nouvelles générations de féministes. Je suppose que l'idée était de dire "première librairie lesbienne de Paris" comme le titre StreetPress, mais que ça a glissé de "première" à "seule", puis de "exclusivement lesbienne" à "lesbienne et féministe et LGBTI+" pour des raisons non expliquées.
Et même si on retire certains critères, il faut compter sur le fait que les bars et cafés ferment assez souvent. Par exemple, j'avais des bons souvenirs des Petites Gouttes du coté de la gare du Nord qui n'a rien de particulièrement LGBT friendly, mais le bar a fermé en février 2020 (d'après sa page Facebook) soit juste avant la pandémie.
Donc pour le moment, je suis encore en recherche de backup. Contrairement à l'Amérique du Nord ou on trouve facilement des cafés pour bosser (comme j'ai pu le voir quand j'ai vécu la bas), il n'y a pas la même culture de travail dans les cafés, et les prix de Paris font qu'on doit rentabiliser l'espace en augmentant les prix ou la densité (et donc le bruit).
Et même si l'Amérique du Nord n'a pas beaucoup de café spécialement queer, il est plus facile de convertir un café en un café queer que de convertir un bar queer en un lieu calme queer. Et vu les soucis dans la communauté LGBT avec l'alcool en partie du à la sociabilité festive mais aussi le besoin de s'échapper de la pression sociale (via des substances psychoactives), il me parait assez difficile de faire vivre un lieu queer sans avoir l'apport financier venant soit de la vente de boissons, soit de faire venir plus que des personnes queers.
Mon dernier angle d'attaque serait donc de viser les établissements qui sont plus ou moins progressistes, en partant du principe que par osmose, ils vont être LGBT friendly. Une orientation possible serait de chercher du coté des cafés vegans dans Paris, en fouillant par exemple sur Happy Cow, même si les mouvements antispécistes sont parfois problématiques, et parfois un peu bourgeois (même si vu mon salaire, ça serait l'hôpital qui se fout de la charité).
Si quelqu'un a des idées, n'hésitez pas à essayer de me le signaler en étant créatif (sans être trop creepy).